vendredi 27 août 2010

La CNIL prend pied dans les Google cars

Il y a quelques jours, Google annonçait la reprise de la circulation des Google Cars, ces véhicules collectant des données photographiques pour le service Street view. Cette circulation avait de facto cessé au printemps 2010, lorsqu'il a été découvert que Google enregistrait des données de géolocalisation par le biais des réseaux wi-fi rencontrés, parmi lesquelles de nombreuses données à caractère personnel. La polémique a été internationale.

C'est pourquoi lorsque le retour des terribles Opel astra a été annoncé (ils achètent même pas français, attends), la CNIL s'est fâchée dans un petit avis, jugeant cette reprise prématurée ; doux euphémisme, vu qu'elle estime que la collecte par le biais des wi-fi des riverains est en soi illicite, alors que Google ne se reproche que la présence finale de données personnelles au sein de données de géolocalisation.

"La CNIL rappelle qu’à la suite de la collecte illicite d’informations personnelles au passage de ces véhicules, notamment au travers des bornes Wi-Fi des riverains, elle a mis en demeure Google de cesser toute collecte de données à l’insu des personnes concernées, de veiller à ne plus collecter de telles données de façon illicite ou déloyale et de lui fournir un certain nombre d'informations sur les modalités de recueil de ces données dans le cadre de Street View. "

Avec tout le respect dû au style ampoulé de notre autorité administrative préférée, je pensais que c'était un peu léger pour faire reculer Google et son principe simple de vie : stocker tout ce qui est immatériel, scanner tout le reste. Evidemment, ça n'a pas suffit, 21 Google cars sillonnent aujourd'hui les routes de France et de Navarre, en principe exemptes de tout matériel wi-fi. Du moins peut-on compter sur la bonne volonté autochtone pour attaquer à coup de palme les insolentes carrioles.

Soutenant ces initiatives locales, la CNIL a fait procéder à la fouille de plusieurs Google cars en marraude le durant la semaine du 23 août (source : Bloomberg). L'autorité a en effet le pouvoir de visiter tous locaux ou installations servant à la mise en oeuvre d'un traitement de données à caractère personnel et à usage professionnel (je t'arrête tout de suite dans ton idée saugrenue de vouloir donc loger les salariés de Google dans leur voiture pour éviter ce genre de désagrément, qu'est-ce que tu as l'esprit mal tourné, car même un domicile privé peut être visité s'il héberge une activité professionnelle) Le secrétaire général de l'autorité a déclaré que cette fouille avait pour objet de "vérifier qu'ils avaient cessé de collecter des données Wi-Fi".

MàJ via Zorgloob : le service de presse de Google aurait tempéré cette nouvelle, en expliquant que cette fouille relevait d'un rendez-vous convenu auparavant entre les deux parties.


Un mot d'admiration aux services de la CNIL, déjà chargés d'inspecter les fichiers de la France entière et contraints aujourd'hui de poursuivre les Google cars dans les rues, le tout avec 150 personnes grand max... Le blog dédié à l'actualité Google, Zorgloob, relève le caractère principalement médiatique de ces fouilles, qui bien évidemment auraient pu avoir lieu dans les locaux/garages de Google, mais pourquoi faire simple quand on peut faire tapageur ?

Les résultats de la fouille n'ont pas été communiqué, ils iront rejoindre les nombreuses informations que Google a fourni à la CNIL afin que ses méthodes de collecte soient analysées. Suspens insoutenable, surtout pour Google, pour qui les décisions de la CNIL sont le sel de l'existence et qui, pour tromper son angoisse, continue à faire rouler ses voitures où bon lui semble.


Badineuse

mercredi 25 août 2010

ACTA - do not want


Avant que l’effet-rentrée ne provoque le retour de la psychose, faisons le point sur l’ACTA, en français Anti Counterfeiting Trade Agreement (parce que Accord commercial anti-contrefaçon, ça donne ACAC et c’est vraiment moche ; or avant la fin de l’année civile, tu auras entendu ce terme jusqu’à la nausée, alors autant avoir un acronyme sympathique ; par exemple, Hadopi, c’est marrant à dire plusieurs fois très vite).

ACTA est pour le moment un projet d'accord international, plutôt vieux, datant d’une initiative USA-Japon de 2006 et en est à son dixième round de négociations qui a eu lieu du 16 au 20 août à Washington. Son but est d’aller au-delà de la protection minimale en matière de propriété intellectuelle, telle qu’elle est actuellement prévue par l’accord sur les ADPIC de 1994 (accord annexe de l’OMC, sur les aspects des droits de propriété intellectuelle touchant au commerce) et les accords Internet ultérieurs.

Le champ concerné semble très large, étant donné que toute violation aux droits de propriété intellectuelle est visée, ce qui englobe à la fois le téléchargement illégal, le contournement des mesures de protection, mais également la contrefaçon de médicaments, les mesures douanières, etc.

Le grand succès de la négociation de l'ACTA, dès les premiers jours, fut sa communication très réussie, communément surnommée epic fail. Les négociations se sont faites sous le sceau du secret (rapidement éventé, le secret, mais ce n'est pas une raison pour ne pas se plaindre de la tentative) ; les rares acteurs à avoir été invités à la consultation, comme Google et eBay, ont dû signer un accord de non-divulgation. Même le Parlement européen a demandé à être informé de l’avancement des négociations (on se rend utile comme on peut).

Attaquons ACTA !Dès lors, même les fuites de Wikileaks et les diffusions ponctuelles n’ont pu empêcher le mouvement de panique, l’impression que la liberté du Net était secrètement condamnée (ça et la montée des applications, c'est le bordel je te dis). En France, le tout s'est fait sur fond chaotique de vote Hadopi, donnant l'impression d'un vaste complot mondial des méchants contre... On ne compte plus les associations/collectifs/blogs de défense/protection/sauvegarde/promotion du logiciel libre / de l’Internet ouvert / du téléchargement / du panda oriental, qui dénoncent l’ACTA comme étant contre la liberté d’expression et de communication et le droit à l’information et tout ce qui ressemble de près ou de loin à un droit fondamental. Un peu puéril, un peu inquiétant mais comment défendre des négociations qui semblent tant craindre l'opinion publique ?

Soit dit en passant, la communication ACTA, aussi boiteuse soit-elle, me semble plutôt un progrès ; il ne me semble pas que dans d'autres domaines, les pays communiquent au préalable sur leurs drafts, avant de les soumettre à la ratification de leurs parlements respectifs ; il est très positif qu'ils se décident à le faire, mais il s'agit plutôt d'un progrès que d'une tentative de contournement des structures démocratiques au mépris des droits fondamentaux de l'Etre, suis mon regard... 


Au-delà de l’inquiétude classique provoquée par toute intervention législative dans ce domaine, les mesures proposées ne sont pas de nature à rassurer le Net : obligations renforcées de coopération des fournisseurs d’accès dans la divulgation des informations relatives à leurs clients, internationalisation du système de riposte graduée, retour en force des mesures techniques de protection (DRM)… mesures qui brillent actuellement par leur popularité et surtout leur efficacité partout dans le monde…

Finalement on a l'impression (enfin moi, mais j'ai raison) que peu importe le contenu final d'ACTA, le rendez-vous est une fois encore manqué. Et une fois encore, de façon à ce que les trois quarts des concernés aient l'impression qu'on se fout de leur gueule, qu'on a pas joué franc jeu, que tout se fera sans eux et que leur position est incomprise. Alors pourquoi chercher à rester dans la légalité, pourquoi participer aux négociations, pourquoi lutter pour se faire entendre alors qu'il est si simple et finalement plus drôle de regarder le juridique se mettre en place et le détruire techniquement en 10 minutes ?
 
La négociation des accords ADPIC n'avait pas provoqué le quart du commencement du mouvement actuel contre ACTA, et ce non seulement parce que ce n'est plus politiquement jouable de négocier un traité majeur en maintenant une telle opacité ; et surtout parce que les nouvelles technologies sont un terrain sur-sensible et que les politiques ne semblent pas vouloir s'en apercevoir. Or il y avait là l'occasion, une de plus, de faire une vraie analyse de la situation ; d'en impliquer les acteurs ; de trouver un terrain d'entente entre la réalité du comportement quotidien de l'internaute et les solutions juridico-économiques idéales pour l'industrie.
 
C'est encore possible, mais cela commence mal...

Pour aller plus loin, signer des pétitions, écrire à ton député, envoyer des mails à Jessi Slaughter et son père, afficher des messages de soutien à l'OMC :


-Wikipedia
-La Quadrature du Net
-Commission Européenne
-Free Software Foundation
-Electronic Frontier Foundation


Badineuse

vendredi 20 août 2010

Lolstuff

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 Sur une heureuse suggestion de ma lectrice préférée, je me permets de te faire un petit résumé du phénomène lolcat, entré dans les moeurs et pourtant encore inconnu ou dédaigné de trop de gens sérieux... :)


Un lolcat est en général une photo mettant en scène un chat, de préférence dans les postures les plus curieuses, ou avec une expression étrange, ou encore dans une position mignonne. Le tout est le plus souvent accompagné d’une légende, une réplique que le chat exprime.

L'association d'une réplique marrante avec un animal ne date pas d'hier, d'autant plus que le chaton est un animal souvent associé aux pitreries et aux maladresses ; sans compter l'énorme potentiel "mignon". La fameuse carte postale de 1905 "What's delaying my dinner ?" a par exemple fait le tour du Net comme preuve du caractère pre-Internet des lolcats, et de leur grande sous-catégorie : cats wearing clothes.

La diffusion des lolcats s'est opérée soit par le biais de plate-formes comme 4chan, spécialiste du détournement d'images et de mèmes (un mème est la reprise d'une illustration, d'une réplique, d'une personnalité dans une communauté virtuelle, qui persiste et se diffuse en étant transformé de façon humoristique), soit par la spécialisation de certains sites comme le fameux icanhascheezburger.com.  

On reproche souvent aux lolcats 1) leur humour débile 2) leur orthographe navrante. Amis des portes ouvertes à enfoncer, bonsoir.

En ce qui concerne l'humour, on ne va peut-être entrer dans le débat millénaire de "ce qui est drôle". Les amateurs de calembours accueillis par le silence navré de leur compagne me comprendront. L'originalité de la débilité du lolcat, et donc, à mon sens, sa grandeur, est l'irruption du mignon-cute-kawaï dans le drôle.

Démonstration >>

C'est ce qui fait que le lolcat réunit à la fois les plus geeks qui en ont fait des dérivés sous forme de mème, avec les lolprez sur les présidents du monde, les lolcops pour la police, les lolmaps, les lolgeeks ...et à la fois les plus girly ou enfantins, qui ont étendu les animaux avec le loltapir ou ont étendu le champ du mignon, les lolponeys.




A une époque, il y a eu aussi le lolracoon qui parlait latin pour une raison incompréhensible...


Je suis preneuse de toute explication à ce phénomène précis...


En ce qui concerne l'orthographe, on pense ce que l'on veut de la pureté de la langue de Shakespeare, mais force est de constater que l'écriture phonétique des lolcats fait corps avec ce type d'humour. Certains expliquent que le lolcat parle de la façon abêtie dont on tend à parler aux chats ; d'autres estiment qu'il s'agit juste de donner une intonation à l'image ; ou encore qu'ils parlent un peu comme les enfants. Le plus drôle reste que le lolspeak est en train de se trouver à lui-même des règles spécifiques :

- sur l'orthographe : n'importe quoi pourvu que ce soit phonétiquement juste et orthographiquement faux :  le "teh" pour "the", le "sry" pour "sorry", le "iz" pour "is" (d'ailleurs, règle annexe, tu ne mettras jamais assez de "z" dans tes phrases), et puis en fait si c'est phonétiquement faux comme le "noez", pour "no", ça va aussi on est république quoi...
- sur la conjugaison : ne jamais faire correspondre ton sujet et ton verbe, on dit " I has" ou rien
- les formulations consacrées qui ont créé des catégories, le "do not want", "im in ur + ing" ou...

je te laisse consulter le Definitive Lolcats Glossary... 




En tout état de cause, je ne sais pas trop pourquoi on vient faire des procès de linguistique à des images qui clairement ne se revendiquent pas comme le fin du fin de la poésie. Le lolcat souffre en fait de l'énervement que cause le langage sms sur les forums, alors que le contexte n'est évidemment pas le même.



Quoiqu'il en soit, le lolcat reste très présent sur le Net et demeure un des bijoux d'aberrations que l'on rencontre au détour des pages et selon l'humeur plus ou moins massacrante de 4chan. Je vous invite à les savourer avant que les applications ne se mettent à mettre trop de rationalité sur Internet...!


Badineuse

_(^o^)_
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jeudi 19 août 2010

Le Web se meurt, le Web est mort

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We’re all going to die !!!

Déjà vu ? C’est normal, déjà parce que je te soûle avec ça depuis mille ans, ensuite parce que tous les matins dans le Monde/ le Figaro / le Journal de Mickey, depuis 10 ans, tu lis une tarte à la crème sur la fin de la presse écrite.

A world Google can’t crawl, one where HTML doesn’t rule

Aujourd’hui, d’ailleurs je t’en parlais hier, c’est Wired.com qui titre The Web is Dead. Long Live the Internet. Long story short, l’internaute lambda tendrait de plus en plus à utiliser des applications pour accéder au réseau Internet, tandis que le mode de consultation par navigateur, le Web, la Toile, se rétracterait chaque jour. Faux scoop vu que tu as lu The Death of the Open Web et sa fine analyse il y a quelques temps.

Plus que le confort, la facilité, le côté luxueux des applications, Wired insiste plutôt sur la logique évolutive de toute technologie « invention, propagation, adoption, contrôle » : nous sommes entrés dans la phase de rationalisation, de perfectionnement, par opposition au bordel qu’est le Web.

«The story of industrial revolutions, after all, is a story of battles over control. A technology is invented, it spreads, a thousand flowers bloom, and then someone finds a way to own it, locking out others. It happens every time. »

Si cela ne suffisait pas, on nous fournit aussi un graphique bizarre mais très coloré en tête d’article, où tu vois grosso modo la part du Web se restreindre en allant vers la gauche. Imparable.



Heureusement nous sommes en août, il n’a pas fallu trois heures aux pros pour se jeter sur un troll aussi prometteur : le très prisé Techcrunch conteste la sacro-sainte preuve par le graphique et se fend d’un argumentaire qui se résume à « les tendances, ça va, ça vient » ; en plus drôle, Boingboing a sorti ses propres graphiques, où les courbes explosent dès lors que l’accroissement du trafic Internet est pris en compte.




Finalement, tout se jouera probablement selon les supports ; l’application trouve sa logique dans l’inconfort réel à naviguer sur le Web par le biais d’un téléphone. Et à l’heure où l’ordinateur est en train de totalement muter par le biais des smartphones, tablettes et autres, il faut être un visionnaire hors pair pour dire quel mode de consultation triomphera, et sous quelle forme se présentera-t-il à ce moment.

Ce que l’on sait pour sûr c’est que le Web est un gros bordel ; qu’on aime muser librement dessus ; qu’on aime aussi l’application simple qui répond si vite ; deux plateformes différentes pour deux usages totalement différents. De plus, la concurrence réelle des applications force le Web à évoluer : de quelle façon, c’est le débat … (NB : visiblement le Standblog en a une petite idée !)


Badineuse
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mercredi 18 août 2010

Revue de Web

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En attendant de retrouver le temps et l'énergie de critiquer la terre entière, quelques liens pour ceux qui s'ennuient au boulot en ce milieu d'août :

- La mort du Web face à la montée des applications (bis, on en a déjà parlé ici) :
- Le démarrage tant attendu d'Hadopi bute sur les frais imposés aux FAI (on est pas en France pour rien)

- La subtilité des campagnes de pub anti-Apple
- Le droit à l'oubli selon Google : changer de nom (Eco89) ; màj : avec déjà un petit guide-du-changement-de-nom-pour-cause-de-beuveries-répétées pour les nuls sur Slate.fr

- La CNIL (qui ne dort jamais) alerte (un 16 août) sur les risques liés à la réalité augmentée

  - le lolcat c'est de l'art ; rendons-lui un bref hommage


 Après toutes ces bêtises, je vais te laisser parce que mon mémoire à la gloire des modèles propriétaires ne va pas se bâcler tout seul.


Badineuse
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